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Venise, frileuse envers l’architecture actuelle
septiembre 21, 2008, 9:27 pm
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LE MONDE | 21.09.08 | 14h13  •  Mis à jour le 21.09.08 | 14h13

Venise Envoyé spécial

Pas si simple de
glisser de l’architecture contemporaine dans le décor muséal de Venise.
Les projets de deux architectes stars, le Français Rudy Ricciotti et
l’Espagnol Santiago Calatrava, rappellent cette dure réalité en pleine
Biennale d’architecture. Le premier a dessiné le futur Palais du cinéma
du Lido avec les Génois de l’agence 5+1 AA. Le second signe un nouveau
pont high-tech au-dessus du Grand Canal. Le chantier du Palais du
cinéma vient de commencer : la première pierre a été posée le 28 août,
pendant la Mostra. Rudy Ricciotti a remporté en 2005 le concours
destiné à doter le Lido d’installations dignes de son festival de
cinéma. Le point fort de ce projet de 70 millions d’euros, financé par
la ville de Venise, la région Vénétie et l’Etat italien : il est en
grande partie enterré, pour conserver l’espace vide de la place du
Lido, devant l’actuel Palais du cinéma et le casino. Seul émerge le
volume de la grande salle, bloc arrondi d’aspect terreux, ouvert sur
l’extérieur grâce à une spectaculaire verrière nervurée comme une aile
de libellule.

Jeudi 11 septembre, le tout-Venise et un aréopage d’architectes
français et italiens étaient invités à fêter, dans les jardins de la
collection Peggy Guggenheim, le lancement d’un ouvrage consacré à
l’édifice (éd. Ante Prima, AAM Editions et Silvana Editoriale). A
l’heure des discours enthousiastes, Rudy Ricciotti, l’un des
architectes français les plus en vue et les plus en verve, détonne : «Je
suis anxieux. Le chantier a été lancé à partir de simples esquisses, et
nous n’en avons pas la maîtrise. Nous avons une simple mission de
conseil, de direction artistique. Je ne sais pas ce que va devenir le
projet. Les entreprises risquent de vouloir faire des économies
partout, et alors…»
En 2007, après deux ans d’immobilisme,
l’appel d’offres est lancé précipitamment, sur la base de
l’avant-projet sommaire, pour accélérer la construction d’un bâtiment
qui doit être terminé en 2011, pour le 150e anniversaire de l’unité italienne. Le projet définitif et l’exécution sont confiés à un groupement d’entreprises de Vénétie. «Ils sont censés respecter notre concept et nos prescriptions. On verra. De toute façon, je peux toujours retirer ma signature», prévient l’architecte.

PRESQUE EN CATIMINI

Le
soir même, à l’autre extrémité du Grand Canal, la nouvelle passerelle
entre les gares routière et ferroviaire était ouverte aux piétons
presque en catimini, sans inauguration. Bizarre, pour le premier pont
bâti à Venise depuis soixante-dix ans ! Son auteur, Santiago Calatrava,
auteur du sculptural Opéra de Valence, a rappelé dans El Pais, le 3 septembre, que l’exécution des travaux avait été «complètement en dehors de ses mains», tout en affirmant : «C’est mon pont le plus beau.»
Mais cette élégante courbe de verre et d’acier, aux culées de pierre un
rien maniérées, a subi d’innombrables oppositions et bien des
modifications, y compris pour rendre sa forte pente accessible aux
handicapés grâce à une nacelle. Résultat : douze ans de gestation et un
budget passé de 4,5 millions d’euros à plus de 20 millions. C’est
désormais vers la pointe de la Douane, dissimulée derrière des bâches,
que se tournent les regards réprobateurs des Vénitiens. Le Japonais
Tadao Ando rajeunit le monument pour y loger une partie de la
collection d’art de l’homme d’affaires François Pinault. Ouverture
prévue en juin 2009. Si tout va bien.

Grégoire Allix